Histoires de radio

Russie:
Radio Paix et Progrès, La voix de l'opinion publique soviétique.




En 1964, les auditeurs de l'ouest n'en croient pas leurs oreilles : Voilà que l'U.R.S.S. donne la parole à son opinion publique!



Une nouvelle radio « libre » émettant de Moscou inonde les ondes de l'Europe de l'Ouest avec des émissions en français, anglais, allemand, portugais, espagnol..
Cette station était en réalité une pâle copie de Radio Europe Libre et de Radio Liberty à la sauce moscovite !

Une aventure qui a débuté en 1957
Des membres de Radio Moscou avaient adressé une lettre à Nikita Sergeyevich Khrouchtchev en 1957. Se basant sur leur analyse de médias internationaux, ils demandaient d'établir un radiodiffuseur international soviétique sur le modèle de RFE/RL.
Cette lettre, qui reconnaissait l'efficacité de RFE, a amené la Kremlin a lancé en 1964, une telle station.

Qui se cachait dans l'ombre ?
Officiellement, la station était une organisation publique non gouvernementale. Elle était enregistrée comme une idée originale conjointe des organismes publics soviétiques - le Comité soviétique pour la paix, le Comité soviétique pour la solidarité avec les pays d'Asie et d'Afrique, les organisations du Comité et de la jeunesse des femmes soviétiques de l'URSS, l'Union des sociétés d'amitié et la culture relations avec les pays étrangers, l'Union des journalistes et des écrivains soviétiques, Agence de presse « Nouvelles », ainsi qu'un certain nombre d'autres associations.
Sa tâche était de «promouvoir la compréhension mutuelle et la confiance entre les peuples de tous les pays».
En réalité, ne soyons pas dupes, cette machine engagée dans la propagande des idéaux communistes était entre les mains du département idéologique du Comité central du PCUS et du KGB.
Le gouvernement soviétique disposait d'une radio de propagande qui n'engageait pas officiellement sa responsabilité.

Qui était Radio Paix et Progrès ?
En pratique, Radio Paix et Progrès utilisait les installations techniques de Radio Moscou et réalisait 161 heures par semaine en 13 langues.
La majorité des thèmes abordés étaient des thèmes standards qui suivaient la ligne officielle. Les émissions étaient nettement plus tendancieuses et plus directes que celles de Radio Moscou, proposant des lignes de propagande que le gouvernement soviétique pouvait désavouer.

Un canevas standard.
Les émissions de « Peace and Progress » « Paix et Progrès » « Mir y progress » étaient divisées en programmes d'une demi-heure, diffusés à différents moments de la journée.
Chaque programme comprenait 10 à 12 minutes d'infos suivit de commentaires, discours de représentants du public soviétique et étranger ou de réponses à des lettres d'auditeurs. Le tout accompagné de courtes séquences musicales.

Le père spirituel de Radio Sputnik et Russia Today.
Alors que Radio Moscou se contentait de traduire un contenu standard en différentes langues, le contenu des émissions de Paix et Progrès étaient beaucoup plus insidieux.
Le contenu était à chaque fois adapté en fonction du publics ciblés. À titre d'exemple :
Dans le diffusion sur vers la Chine.. La radio montre l'hypocrisie de Washington dans les questions de Taïwan et du Tibet, explique l'amitié historique et l'importance de la coopération de la Chine et l'Union soviétique et de convaincre un public d'une profonde sympathie et sincères au public soviétique de la République populaire de Chine.
En diffusant vers les pays de l'Afrique australe.. Elle se faisait le porte-parole contre le racisme et l'apartheid. Elle parlait de la conspiration des cercles dirigeants aux États-Unis et d’autres pays occidentaux avec la pointe raciste de l'Afrique du Sud, montrant que l'impérialisme international considère le régime de Pretoria comme un tremplin pour l'expansion impérialiste dans les pays en développement. Pais et Progrès apportait le soutien du peuple soviétique aux mouvements antiracistes de libération.
Vers l'Amérique latine.. Elle affichait le soutien du peuple soviétique aux peuples latino qui se défendaient contre la domination politique et économique de l'impérialisme nord américain.
Les émissions vers Israël.. La station tentait à démontrer que le bon peuple d'Israël était la victime de l'opportuniste du gouvernement sioniste. Elles s'attelaient à convaincre que la politique d'annexion et de militarisme ne peut pas renforcer la sécurité israélienne et conduit à l'isolement international de l’État juif, ce qui est contraire aux intérêts vitaux du peuple.
Vers les pays arabes.. La station assure le promotion de la position soviétique sur le processus de paix au Moyen-Orient et la solution du problème palestinien et parle de l'hypocrisie américaine envers les Arabes.

La voix de l'opinion publique !
Une propagande insidieuse et très bien étudié : La station parlait au nom du peuple soviétique et non au nom de l'état.
C'était le peuple soviétique qui était solidaire de la population locale et qui voulait l'aider en mettant en garde. Gonflant l'importance de faits divers pour créer l’événement.
Une technique toujours d'application même si le nom de Paix et Progrès a disparu en 1991, Radio Sputnik et RT France ont pris la relève.

Document secret.
La fameuse lettre de Radio Moscou à Kroutchev, demandant le création de la radio, qui se trouvaient dans les archives du Kremlin est entrée en possession du Wilson Center, en voici le contenu traduit en français.

Cher Nikita Sergeyevich!

Nous vous demandons de nous pardonner de vous avoir contacté directement, mais la question que nous aimerions soulever n'est pas de la compétence d'un département spécifique.

La révolte contre-révolutionnaire en Hongrie a montré l'efficacité de la station de radio Free Europe, notamment en lançant des ballons aériens propagandistes et un réseau souterrain d'informateurs et de provocateurs.

À notre avis, l'efficacité de l'Europe libre peut s'expliquer par des facteurs socio-économiques, en plus des facteurs suivants:

1. L'échelle de l'activité propagandiste.

2. Indépendance formelle de tout type de pouvoir d'État.

3. Large participation des émigrés politiques et des réfugiés des pays européens de la démocratie populaire.

L'échelle de l'activité propagandiste de l'Europe libre peut être jugée sur la base des données suivantes.

La station de radio Free Europe à elle seule, qui ne couvre que les démocraties populaires européennes, emploie environ 1300 personnes, soit presque autant que notre principale direction de la radiodiffusion qui diffuse dans presque tous les pays du monde.
Il est à noter que l'ampleur de notre propagande radiophonique à l'étranger n'est rien en comparaison de celle de l'Occident.
Les Américains, par exemple, pour diffuser de la propagande dans un seul pays, relaient plusieurs programmes de la Voix de l'Amérique et maintiennent une station de radio spéciale appelée RIAS à Berlin-Ouest, qui compte jusqu'à 1000 employés, principalement des Allemands.
Pour apprécier ces chiffres, considérons que l'équipe de radiodiffusion allemande basée à la radio de Moscou n'a que 30 personnes, dont aucune ne vient d'Allemagne au cours des 20 dernières années.
L'Angleterre, tout en souffrant d'un déficit budgétaire chronique qui l'oblige à réduire même les dépenses militaires, ne réduit pas les crédits pour la propagande radiophonique.
Environ 14 000 employés travaillent à la BBC en ce moment.
Environ 4 000 travaillent dans la seule radiodiffusion étrangère, ce qui est beaucoup plus élevé que la diffusion étrangère dans la radio de Moscou.
L'indépendance formelle de Radio Europe Libre vis-à-vis de tout type de pouvoir étatique lui confère une discrétion illimitée et lui donne l'air d'être objectif et impartial.
Notre radio est également désavantagée à cet égard.
Les émigrés contre-révolutionnaires des pays socialistes ont de nombreuses occasions de livrer une propagande incendiaire dans ces pays à travers Radio Europe Libre, Radio Liberty et d'autres institutions de propagande.
Nos amis du clandestin et de l'émigration, par exemple, les communistes grecs, arabes, espagnols et iraniens, n'ont pas de telles opportunités.
Contrairement Radio Europe Libre ou Radio Liberty, la radio de Moscou, en tant que station de radio publique, ne se mêle pas des affaires intérieures des autres pays dans la conduite de sa propagande.
Cela nous prive de nombreuses occasions d'influencer la formation de l'opinion publique dans ces pays.
Il est dans notre intérêt de donner à nos amis et aux autres éléments de l'opposition dans les pays capitalistes la possibilité de faire de la propagande à la radio et par d'autres moyens dans leurs pays.
Compte tenu de cela, nous considérons qu'il est opportun d'établir, sous notre direction officieuse, une organisation sur le territoire de l'Union soviétique et plusieurs autres démocraties populaires qui, dans une certaine mesure, serait, dans ses fonctions, son but et ses méthodes, L'Europe.
Nous sommes convaincus qu'avec l'aide d'une telle organisation, qui aurait à sa disposition des stations de radio formellement indépendantes du gouvernement, et qui pourrait lancer des ballons gonflables propagandistes (vivre avec les loups, hurler comme un loup), il serait possible pour nous de réaliser un grand succès dans nos efforts de propagande.
Si, par exemple, un puissant émetteur radio a été installé près de la frontière grecque avec plusieurs douzaines de propagandistes grecs et chypriotes, une atmosphère semblable à celle qui règne dans le Moyen-Orient depuis quelques mois pourrait affecter l'Angleterre et le reste de l'OTAN.
La même chose peut être appliquée à un certain nombre d'autres points faibles du monde capitaliste.
Pour que ces centres de propagande soient formellement indépendants du gouvernement soviétique, on pourrait annoncer qu'ils sont financés par des dons privés provenant d'individus séparés et d'organisations non partisanes (exactement comme cela est fait par Free Europe).
L'activité de ces stations de radio et l'adoption des méthodes de l'Europe libre provoqueraient, sans aucun doute, des protestations en Occident, mais réfuter ces protestations ne poserait pas beaucoup de problèmes.
Dans le pire des cas, ces stations de radio pourraient être fermées. Même dans ce cas, nous serions du côté des gagnants.

Avec les salutations communistes,

Membres du PCUS:

I. Romantsov - Rédacteur en chef des émissions en Allemagne

A. Turtushkin rédacteur en chef adjoint des émissions en Allemagne

A. Zholkver secrétaire de l'organisation du Parti de la rédaction

17 janvier 1957

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J'ai réalisé de nombreuses photos au cours de ma carrière, d'autres m'ont été fournies par les radiodiffuseurs ou d'anciens collègues, que je remercie.
Si vous ne souhaitez pas qu'une photo soit publiée j'invite l'auteurs et la personne photographiée à me contacter par mail: michel chez fremy.be .